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Corentin la Truite joue une Partie de Cartes

by Georges la Saucisse

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1.
Table des matières Introduction CHAPITRE 1 - Corentin la Truite CHAPITRE 2 - Un Motif en Ravioli CHAPITRE 3 - Un Plongeur dans le Coma CHAPITRE 4 - Un Mini-Van pour le Garagiste CHAPITRE 5 - La Gondole vers la Télévision CHAPITRE 6 - Le Frigo de la Tour CHAPITRE 7 - Lecture de Dépliant (Partie 1) CHAPITRE 8 - La Planche du Bûcheron CHAPITRE 9 - L'Étagère Assourdissante CHAPITRE 10 - Lecture de Dépliant (Partie 2) CHAPITRE 11 - Des Pommes de Terre contre l'Urticaire CHAPITRE 12 - Le Scotch à Poissons CHAPITRE 13 - La Cuisine sous la Pluie CHAPITRE 14 - L'Hippodrome des Lumières CHAPITRE 15 - La Majorité des Chiffres CHAPITRE 16 - Le Trampoline et les Condensats CHAPITRE 17 - Lecture de Dépliant (Partie 3) CHAPITRE 18 - L'Encre pour Carapace CHAPITRE 19 - Bredouille face au Scandale CHAPITRE 20 - Lecture de Dépliant (Partie 4) CHAPITRE 21 - Des Tâches sans Honte CHAPITRE 22 - Jouer une Partie de Cartes Conclusion
2.
Introduction 01:23
Bonjour ! Je suis Georges la Saucisse ! J'ai improvisé un Grand Conte de Noël en Novembre 2020, et des gens m'ont aidé à le réaliser au long du mois. Ainsi, quelques jours avant le 1er Novembre : Les gens ont proposé plein de mots (des objets, des lieux, ...) via le canal de leur choix parmi les suivants : Sur PeerTube (@georgeslasaucisse@peertube.desmu.fr) en commentaire. Sur YouTube (GeorgesLaSaucisse) en commentaire. Sur Mastodon (@desmu@mastodon.desmu.fr) en pouet. Sur Twitter (@georgessaucisse) en tweet. Sur georgeslasaucisse.fr via la page Contact, et bien non, y'a plus de page Contact, mais mon site était toujours bien ! Deux mots étaient choisis parmi leurs propositions. Les gens devaient également voter pour leur personnage préféré dans un sondage listant mes deux acolytes. Le personnage avec le plus de votes a été désigné comme personnage principal de ce Grand Conte, et présent dans son titre avec les deux mots choisis. Et puis du 1er au 24 Novembre : Une vidéo a été publiée chaque jour, comprenant un chapitre du conte lu au format sonore, illustrée d'un presque joli dessin de la situation actuelle de l'histoire. Le fichier audio a également été publié sur desmu.bandcamp.com ! À chaque nouvelle vidéo, il était demandé de reproposer des mots via les mêmes canaux. Deux mots ont été choisis chaque jour, définissant la base du titre du chapitre suivant, jusqu'à ce qu'on arrive à la fin du Grand Conte.
3.
Il était une fois, dans un pays fort lointain, il y a fort longtemps, près d'un océan fort mouillé, vivait une truite, du nom de Corentin, aussi connue sous le nom ... de Corentin la Truite. Logique. Corentin disposait d'une particularité physique pour le moins particulière : quelque soit l'angle sous lequel on le regardait, on ne pouvait voir que la partie supérieure de son corps, composée de sa tête et du début du reste de son corps. Jamais personne n'avait vu ses nageoires, ni l'arrière de son corps, et personne d'autre que lui ne sait pourquoi. La curiosité ne manque pourtant pas à l'appel, nombre de personnes s'interrogent, et posent la question à Corentin : de quelle habileté physique bénéficie ce poisson pour exécuter une pareille performance acrobatique en permanence ? Mais le mystère reste entier, et ce pour une raison, ... Il se trouve également par la force des choses que Corentin la Truite fait partie des êtres vivants disposant des formes d'intelligence les plus évoluées au monde ! Il dispose d'un quotient intellectuel de 384 ! Il bénéficie d'une mémoire lui ayant permis de mémoriser des millions d'articles d'encyclopédies à la virgule près ! Il a élaboré une formule chimique capable de transformer le dioxyde de carbone en eau plate ! Il a théorisé un système économique où personne ne manque de besoins primaires dans le monde tout en conservant la richesse indécente des plus puissants ! Il a développé une méthode pour renverser tout régime autoritaire sans aucune violence ! Mais le monde n'a jamais pu bénéficier de ses extraordinaires capacités, et ce pour une raison, ... Plus grand encore, les ouvrages du passé rapportent des témoignages de personnes ayant croisé Corentin la Truite ... au cours des 1500 dernières années a minima ! Il a vécu plusieurs époques historiques, assisté à des centaines de conflits, connu des dizaines de milliers d'êtres vivants, survécu moralement à des milliards de publications négatives sur les réseaux sociaux ! Toutes les personnes l'ayant croisé ont donc cherché à connaître le secret de sa longévité. Comment était-il parvenu à traverser les époques, à survivre à nombre de cataclysmes sans manifester de volonté d'en avoir marre ? ... Personne ne l'a jamais su, et ce pour une raison, ... Cette raison expliquant les aptitudes physiques de Corentin la Truite, cette raison expliquant les capacités intellectuelles de Corentin la Truite, cette raison expliquant la longévité de Corentin la Truite, ... elle est en réalité simple à comprendre. Il suffit de directement interroger Corentin sur le sujet, et voilà ce qu'il répondra : "Bloublou, bloubloubloup. Bloubloublou, bloublou. Bloubloubloublou bloubloubloup. Blou, blou blou ! Bloubloublou. Blou bloublou bloup blou bloup. Bloup. Et bloup." Corentin est le seul être vivant au monde à parler un patois de la langue des truites, et personne ne comprend ce qu'il dit.
4.
Hola les cuisinos et bienvenue dans cette nouvelle vidéo où je vais vous présenter la recette des ravioli aux aubergines ! Avant toute chose, n'hésitez pas à vous abonner à ma chaîne, à cliquer sur la cloche, à mettre un like à la vidéo, à commenter la vidéo et à partager la vidéo à tout le monde, ça m'aidera beaucoup ! Et je tiens également à remercier mon sponsor Coupi-Coupe, la marque des ustensiles de cuisine malins et responsables ! Rendez-vous sur leur site Internet et saisissez le code promo RAVIOLIAUBERGINES pour avoir une réduction de 10% sur votre première commande (frais de port non inclus). Bien ! Rassemblons d'abord nos ingrédients. Il vous faudra pour la pâte : - 300 grammes de farine - 3 œufs - et du sel Il vous faudra pour la farce : - 500 grammes d'aubergines émincées dans la longueur - 25 grammes de beurre - 2 cuillères à soupe d'huile d'olive - 1 oignon haché - 2 gousses d'ail hachées - 200 grammes de tomates pelées et coupées en dés - 6 feuilles de basilic ciselées - 40 grammes de parmesan fraîchement râpé - et du sel Il vous faudra pour la sauce : - 40 grammes de beurre - 40 grammes de parmesan fraîchement râpé Commencez par préchauffer le four à 100 degrés. Superposez les tranches d'aubergine dans un plat à gratin en les salant au fur et à mesure, puis enfournez-les 30 minutes. Pendant ce temps, nous allons préparer la pâte ! Tamisez la farine sur un plan de travail et formez-y une fontaine, ou un volcan. Ajoutez les œufs et une pincée de sel. Pétrissez, puis roulez la pâte en boule, avant de la couvrir d'un torchon et de la laisser reposer 30 minutes. Passons sans plus tarder à la farce ! Laissez les aubergines refroidir hors du four avant de les peler et de hacher finement leur pulpe. Dans une sauteuse, faites fondre le beurre avec l'huile, puis faites-y revenir l'oignon et l'ail 5 minutes à feu doux. Ajoutez les tomates et laisser le tout frémir 15 minutes, en remuant. Incorporez ensuite la pulpe d'aubergine et poursuivez la cuisson 10 minutes. Retirez enfin la sauteuse du feu pour mélanger le basilic et le parmesan. Notre pâton s'est reposé ! Abaissons-le alors en une fine feuille sur le plan de travail fariné. Déposez des petits tas de farce à intervalles réguliers sur la moitié de la feuille de pâte. Rabattez ensuite l'autre moitié dessus, et pincez la pâte autour des tas de farce. Je prends ensuite ma molette Coupi-Coupe pour dessiner un motif dentelé de ravioli, mais attention ! N'appuyez pas trop fort ! Il faut éviter de les couper ! Appuyez sur leurs bords pour vous en assurer. Cuisez enfin cette grande planche de ravioli al dente dans une grande quantité d'eau bouillante salée en faisant attention à ne pas les séparer. Égouttez la planche, puis aspergez le beurre et le parmesan à feu doux dans la casserole de cuisson. Ça y est ! Vous pouvez saisir votre planche et l'accrocher à la fenêtre ! Et voilà ! Vous avez refait la décoration de votre intérieur avec un splendide rideau en motif de ravioli. Vos convives en seront baba ! La semaine prochaine, nous verrons comment faire un peigne en spaghetti, en attendant, je vous dis à bientôt, et prenez soin de vous !
5.
Comme beaucoup de personnes, Corentin la Truite aurait pu habiter dans la bourgade d'Hertzenfoulchenheim, une ville ayant connu nombre de péripéties ces dernières années, mais il avait choisi de déménager un peu plus loin, sous l'océan, car on savait également s'y amuser. Malgré son passé plutôt enrichissant, le cadre de vie de Corentin était resté plutôt modeste. Il disposait d'une maison tout équipée, avec l'électricité, le chauffage, Internet et surtout l'eau courante, ce qui était plutôt pratique dans ce type d'environnement. Bon, ça reste une maison sous l'eau donc c'est pas la maison la plus banale du monde, mais tout de même. Il disposait également d'un studio de création, d'une bibliothèque et d'une salle de sport ... oui bon sa maison est pas banale du tout en fait ... ce qui lui permettait de pratiquer diverses activités en journée assez tranquillement, comme écouter son tapis roulant, lire ses haltères ou encore mastériser un album de bruits de papier qui se chiffonne. Ces pièces disposaient de diverses fenêtres pour admirer les fonds marins, ce qui lui permettait de se relaxer et de payer une taxe d'habitation mirobolante. Et c'est au travers d'une de ces fenêtres qu'un jour, il vit un plongeur chuter au sol, inanimé. Intrigué par cette visite inopinée, il quitta son domicile pour lui porter assistance. Il observa les alentours, en particulier la surface de l'eau pour tenter de trouver un bateau d'où le plongeur serait parti, mais rien ne lui paraissait hors de propos. Le corps du gugusse restait quant à lui inerte. Qu'avait-il bien pu lui arriver ? Vu que Corentin déteste le suspense, il transporta rapidement le corps inanimé dans son cabinet médical et découvrit qu'il était en fait dans le coma, potentiellement après avoir reçu un coup violent sur le crâne. En cherchant à lui ôter sa combinaison de plongeur, Corentin se heurta à un obstacle : il ne trouvait pas la fermeture. N'écoutant que sa curiosité, Corentin saisit un couteau pour tenter de déchirer la combinaison, mais celle-ci résistait à la pointe. Un doute le prit à la gorge : s'agissait-il seulement d'une combinaison ? Un gugusse était-il vraiment enfermé à l'intérieur ? Vu que l'avis de Corentin sur le suspense n'avait pas changé lors des dernières secondes, il fit entrer le corps du personnage dans les divers scanners qu'il avait à disposition, parce qu'il avait un hôpital privé chez lui en fait, on va admettre ça, ce sera plus simple. Les scanners ne révélaient rien. Littéralement rien. Seul le contour du corps pouvait être distingué, et tout était sombre à l'intérieur. Littéralement rien, sauf une chose, une seule chose ... Dans son crâne, il y avait ... un ravioli.
6.
Le lendemain matin, Corentin la Truite était arrivé dans un garage au volant d'un mini-van. Il fut accueilli par un garagiste au visage familier. "Bonjour ! Ohlala quel bel engin ! Qu'est-ce qu'il lui arrive ?" "Bloubloubloup bloublou bloubloup ! Bloubloublou bloublou blou." "... quoi ?" "Blou blou ... Bloubloubloup bloublou bloubloup ! Bloubloublou bloublou blou." "Bon écoutez j'ai rien compris mais c'est pas grave, je vais regarder." En ouvrant le capot, le garagiste fut surpris de ce qu'il y vit. "Et bien tonnerre de tonnerre, il est bien entretenu ce moteur ! Y'a juste ce câble-là qui pendouille ... ah mais c'est le câble du lave-glace, et il est cassé. Il est bien coupé en deux en plus. Je vais vous arranger ça." "Bloublou !" "Je suppose que ça veut dire merci dans votre langue, du moins je vais admettre parce que sinon on avancera pas." En se retournant pour se diriger vers son atelier, le garagiste présenta son dos à Corentin qui ne put s'empêcher de noter le motif de ravioli imprimé sur le dos de sa veste. "Et vous ? Vous nous venez d'où ?" "Blou, bloubloup, blou !" "Ah j'oubliais, ça sert à rien de faire la conversation." Le garagiste revint avec un câble tout neuf dont il entama l'installation sur le mini-van. "Y'a qui qui parle votre langue par ici ?" "Blou." "Ah mais c'est agaçant en fait cette histoire. Là je vous remplace le câble mais je sais même pas si c'est ça que vous vouliez." "Bloubloubloubloublou !" "Oh ... je crois que j'ai compris ... vous connaissez ma chaîne de cuisine sur Internet c'est ça ? Et vous voulez me faire un gag." "Bloubloublou ... bloublou bloublou." "C'est quand même dingue qu'il y ait des gens pour me retrouver dans la vraie vie et qui viennent me casser les pieds pour ça. Et oui voilà, ma cuisine c'est ma seconde activité, faut bien que je reste garagiste pour manger régulièrement." "Bloubloubloubloubloubloublou." "Parce que bon c'est pas naturel ce sectionnage de câble, j'ai bien compris que c'était vous qui aviez saboté votre mini-van exprès pour venir me voir et vous fiche de moi." "Bloubloubloubloublou, bloubloubloubloublou." "Écoutez voilà, votre câble il est remplacé, et je vous en fais cadeau, c'est de toutes façons pas très cher comme manipulation. Et puis j'ai trouvé de nouveaux sponsors pour ma chaîne donc je peux me permettre des écarts. Maintenant partez !" Corentin enfourcha son mini-van et quitta le garage. Le garagiste lui courut néanmoins après pendant qu'il partait. "Et n'oubliez pas d'aller voir ma dernière vidéo sur les ravioli aux aubergines ! Et de cliquer sur la cloche ! Et de vous abonner ! Et de liker la vidé Corentin était rentré chez lui. Mais avant de laisser son mini-van, il rouvrit le capot, et constata que le câble n'avait pas été changé, mais recollé avec ... un ravioli.
7.
Le lendemain matin, Corentin la Truite était arrivé dans un embarcadère au volant de rien parce que c'était plus rapide d'y aller à pieds. Il fut accueilli par un batelier au visage familier. "Bonjour ! C'est encore vous à ce que je vois !" "Bloubloublou bloublou blou. Bloubloubloup bloublou bloubloup !" "Et oui, je fais plusieurs métiers différents en semaine, j'ai pas encore touché l'argent des sponsors, donc je fais garagiste, batelier et assistant d'accueil en semaine pour combler." "Blou blou ..." "Bon par contre je comprends toujours pas ce que vous racontez. J'ai fait des recherches sur Internet pour vous trouver, mais le moteur de recherche il trouve rien, à part des recettes de cuisine et des paroles de chansons." "Bloubloubloubloublou." "Vous savez même pas dire votre nom dans ma langue ? Parce que sinon je vais vous appeler 'moitié de truite qui dit bloup bloup' jusqu'au restant de vos jours et personne veut ça." "Bloup bloup bloup. Bloubloubloup bloup bloup." "Vous savez quoi ? Je vais vous amener à mon troisième lieu de travail pour vous présenter aux collègues, peut-être qu'ils sauront ce que vous êtes. Allez ! Grimpez là-dedans !" Le batelier montra une gondole à Corentin, qui y prit alors place. Bien qu'il sachait parfaitement nager, il n'était pas contre une petite promenade. La traversée de l'étendue d'eau avait débuté. Le batelier entama une petite chanson. "LAISSEUUH LES GONDOLEUUH À VENIIISEUUH. LE PRINTEMPS SUUR LA TAMIIISEUUH." "Blou ..." "Ah j'aime bien chanter des mots au hasard quand je fais cette traversée. Ça la rend guillerette." "Blou ..." "Ça me fait penser que je vous ai pas dit où on allait. Et bien on va chez mes sponsors figurez-vous, mais ils font d'autres trucs. Vous saviez que c'était une chaîne de télévision ?" "Bloup bloup ?" "Je vous ai pas dit le nom de l'entreprise alors vous pouvez pas deviner. C'est logique en fait je suis un peu bateau. Ça tombe bien, parce qu'on est sur un bateau, vous avez compris ?" "Blou ..." "M'enfin bon je fais la conversation tout seul depuis hier alors je sais même pas si on a atteint un stade relationnel où on peut faire des boutades." "Bloupbloupbloup." "Puis si ça se trouve j'ai raison et vous aimez juste ma chaîne de vidéos et vous êtes venu sur mes autres lieux de travail pour me casser les pieds, et je m'empapaoute pour vous pour rien." "Bloup, bloubloubloup." "Bon écoutez, c'est pas grave on est bientôt arrivé hein, je vais arrêter de parler parce que ça casse les pieds à tout le monde." "Blou ..." "Par contre je peux chanter. LES GONDOLEUUH À VENIIISEUUH LALALALALAAAA Corentin la Truite avait pu poser pied à quai. Du moins c'est une expression pour dire qu'il était arrivé parce qu'il avait pas de pieds. Il était sur une île comportant une seule bâtisse, et quelle bâtisse : une immense tour au sommet de laquelle trônait un néon géant, prenant une forme familière ... la forme d'un ravioli.
8.
Corentin la Truite venait de franchir le pas de la porte de la tour. Devant lui se dressait un immense couloir où tout avait été repeint en blanc : les murs, le sol, les meubles, les plantes, les employés, les repas des employés, ... beaucoup d'employés en train de manger toussaient régulièrement du fait d'ingurgiter de la peinture par ailleurs. Au bout du couloir se dressait un bureau, qui était tenu par notre personnage running-gag favori. "Bonjour ! Et voilà, c'est ici mon troisième travail ! Quand la chaîne sponsorise pas mes vidéos, elle me fait accueillir ses clients !" "Bloup bloup." "Alors donc je vous accueille ... Bonjour, que puis-je faire pour votre service ?" "Bloup bloup bloup, bloubloublou." "Avez-vous pris rendez-vous avec l'un des responsables ?" "Bloublou." "Veuillez patienter, je regarde si je trouve votre nom dans l'agenda, pouvez-vous me l'épeler s'il vous plaît ?" "B, l, ou, p, b, l, ou, p." "Alors bloupbloup ... bloupbloup ... bloupbloup ... non y'a personne à ce nom dans la base de données. Vous voulez prendre rendez-vous avec un responsable peut-être ?" "Bloup." "Très bien, je vous note ... ah, vous avez de la chance, notre PDG Monsieur Ravioli a justement un créneau qui se libère plus tard dans la journée. Vous m'êtes sympathique finalement alors je vous place là-dessus. Vous pouvez prendre place dans la salle d'attente, il pourra vous accueillir d'ici trois semaines !" "Bloup bloup !" "Mais y'a pas de quoi !" Alors que Corentin se dirigeait vers la salle d'attente, l'assistant d'accueil marqua un temps pour se demander si cette dernière réplique était vraiment appropriée, ou si ce qu'il avait pris pour un remerciement n'en était pas un. Mais on ne se posera pas davantage la question parce qu'on ne le verra plus de tout le récit. Six semaines plus tard, la voix du mégaphone de la salle d'attente consentait enfin à appeler notre personnage principal. "Bloupbloup la Truite, vous êtes attendu chez Monsieur Ravioli, étage 92cf-ceb3-9d57-d914-ed8b 14d0-e376-43de-0797-ae56, frigo 7.". Corentin prit alors l'ascenseur pour cet étage. Trois jours plus tard, l'ascenseur était parvenu à destination, et s'ouvrit directement devant le frigo 7, le bâtiment étant bien pensé. Sa porte s'ouvrit automatiquement à l'approche de Corentin, qui se plaça dans le compartiment des poissons. Deux secondes plus tard, il se dit que ce serait finalement plus approprié de se placer dans le compartiment des plats en conserve pour trouver quelqu'un qui s'appelait Monsieur Ravioli. Cinq minutes plus tard, une voix rauque se fit entendre dans l'ensemble du réfrigérateur, Corentin décida de remonter à sa source, et arriva dans le compartiment des pâtes, bien que ce ne soit pas l'endroit le plus approprié pour stocker des aliments secs. Cette voix, c'était celle de Monsieur Ravioli, le rendez-vous de Corentin la Truite, qui n'était ni plus ni moins ... qu'un gnocchetti. Toute la logique du conte venait de tomber à plat.
9.
Monsieur Ravioli avait un certain don pour converser avec ses interlocuteurs. Son influence était telle qu'il pouvait se permettre de se râcler la gorge en faisant un bruit horrible régulièrement sans qu'on lui en tienne compte. "BLEARUGH. Monsieur Bloupbloup ... Je ne crois pas vous reconnaître ... Pourriez-vous vous présenter ?" "Bloubloubloup, bloubloubloup, blou blou. Blou blou bloubloubloup. Bloupbloup blou blou bl ou." "BLEARUGH. Qu'est-ce que c'est que ce charabia ? Vous ne pouvez pas parler notre langue comme tout le monde ?" "Bloupbloublou ! Bloubloublou blou !" "BLARGHUEH. Écoutez ... Si on ne se comprend pas avec des mots, je connais un langage universel, ... celui du jeu." Sur ces mots, le gnocchetti tendit un dépliant déchiré à Corentin la Truite. C'était une règle du jeu "Cartographe de Carteries". "Cartographe de Carteries - Règles du jeu, nombre de personnes pair nécessaire, avec un minimum de six. Il vous faut deux jeux de 54 cartes occidentales traditionnelles, un jeu de 32 cartes occidentales traditionnelles, un jeu de 78 cartes de tarot, un jeu de cartes Hanafuda, un jeu de 40 cartes à collectionner de la franchise de votre choix, 6 cartes de réalité augmentée, un set de cartes de jeu type Uno, un jeu de cartes des 7 familles, 10 cartes postales, un set de cartes de jeu de société de culture générale. Toutes ces cartes doivent être mélangées entre elles avant le début de chaque partie. Chaque personne peut également ajouter une ou plusieurs cartes spéciales à son propre jeu (elles ne sont pas mélangées au reste des cartes), à savoir une carte de type "titre de transport" (permis de conduire, carte de métro ou de bus, ...), une carte de restauration (cantine, sandwicherie, ...), une carte de sécurité sociale et une carte de fidélité non alimentaire. Un ajout d'un type de carte ne peut se faire que si toutes les personnes disposent de ce type de carte et s'accordent pour jouer avec. Enfin, il vous faut également une carte routière, deux planches complètes de billets factice de deux jeux de société différents, un pion de jeu de société par personne, un set d'une centaine de billes, une cordelette, un tas de serviettes en papier, trois câbles USB, au moins une paire d'écouteurs, quatre dés à six faces, et un instrument de musique par personne (flûte à bec, kazoo, guitare, ou tout autre objet pouvant être intégré à un système de percussions). Placez la carte routière sur votre surface de jeu et répartissez les personnes autour de la surface. Distribuez ensuite les cartes mélangées deux par deux à une personne sur deux dans le sens des aiguilles d'une montre en commençant par la personne située la plus à l'ouest. Une fois le premier tour de carte routière réalisé, continuez la distribution en partant de la personne n'ayant pas reçu de carte située la plus à l'est. Une fois le deuxième tour de carte routière réalisé, reprenez la distribution dans le sens inverse des aiguilles d'une montre en commençant par la personne située la plus à l'ouest. Une fois le troisième tour de carte réalisé, continuez la distribution en partant de la personne n'ayant pas reçu de carte au troisième tour située la plus à l'est. Une fois le quatrième tour réalisé, reprenez la logique de distribution des cartes du premier tour et répétez les différentes étapes trois fois, jusqu'à ce que chaque personne ait en moyenne seize cartes. Le reste des cartes est placé en pile face verso sur le côté de la carte routière. À la fin de la distribution, chaque personne disposant d'une carte de tarot peut la replacer au-dessus de la pile de cartes non distribuées. Si une personne reçoit une carte du jeu de sept familles à l'instant de sa distribution, elle peut immédiatement échanger sa place avec celle d'une autre personne autour de la carte routière, puis la distribution peut reprendre. Les personnes ayant échangé leur place conservent leurs cartes déjà distribuées. Si une personne reçoit une carte à collectionner à l'instant de sa distribution alors qu'une ou plusieurs autres cartes ont déjà été distribuées, elle peut immédiatement échanger l'une de ses cartes avec une carte d'une autre personne. Celle-ci peut refuser l'échange, elle devra alors proposer elle-même un échange d'une autre carte de son jeu à une autre personne, qui ne pourra cette fois pas refuser. La première personne à jouer est celle située la plus à l'est, elle peut placer la carte de son choix face recto au centre de la carte routière. C'est ensuite au tour de la personne située à sa droite de jouer, puis à la personne située à la gauche de la première personne, puis à la personne située à la droite de la deuxième personne, puis à la personne située à la gauche de la troisième personne, et ainsi de suite. Une fois que toutes les personnes ont joué, le tour est terminé, et on reprend la logique du tour à partir de la deuxième personne ayant joué au tour précédent. Si une carte est visible face recto quelque part sur la carte routière, une personne devant jouer doit placer une carte en respectant plusieurs conditions, d'abord" Le reste de la règle était manquant. "BLARGOUH. Ce jeu était joué par les anciens sages de l'ancienne Hertzenfoulchenheim. Mais les règles ont peu à peu été perdues au fil du temps. Je vais donc vous proposer une petite partie." "Bloup bloup bloup, bloubloubloubloup !" Corentin semblait furieux, mais il n'avait pas le choix. Même si personne d'autre que lui n'avait pour l'instant compris son plan, il allait devoir accepter l'offre de Monsieur Ravioli.
10.
Une fois n'est pas coutume, afin de jouer une partie de cartes avec Monsieur Ravioli, il fallait d'abord que Corentin apprenne les règles du jeu en entier. Reparti avec le dépliant, il allait se mettre en quête, et en trouver les parties manquantes. Ce n'était pas la première fois qu'il entendait parler de ce jeu ancien. Ayant lui-même vécu au moins 1500 ans, l'évocation des anciens sages de l'ancienne Hertzenfoulchenheim remontait en lui des souvenirs, et il savait parfaitement par où commencer ses recherches. La forêt d'Hertzenfoulchenheim avait été le théâtre de bien des actions au fil du temps. Récemment encore, on y avait dépecé un fruit et assassiné un gugusse avec un feutre. Autant vous dire qu'il s'agissait là d'une région plutôt accueillante. Aussi mais surtout, la forêt a été témoin de rites réguliers voilà plusieurs centaines d'années, et on dit qu'une des descendantes de ces rites ... riteurs ... rituelateurs ... enfin bref une descendante d'un des types qui a participé aux rites ... une descendante donc y habiterait toujours. Corentin l'avait trouvée, et s'en était approché. Il s'agissait ... d'un CD avec une chemise rayée qui était en train de couper du bois. "Bonjour, je peux vous aider ?" "Bloupbloubloup." "... quoi ?" "Bloupbloubloup." "Désolée, je vous comprends pas." "Bloup-blou-bloup." "Attendez ... vous me dites quelque chose ..." Sans plus tarder, le CD interrompit sa tâche pour se diriger vers sa hutte pas loin d'ici, une hutte plutôt cossue mais avec du vis-à-vis vu que c'était dans une forêt, dommage. Parcourant sa bibliothèque, elle avait fini par trouver un vieux livre de légendes. En le feuilletant, elle avait retrouvé la page qu'elle cherchait : une page représentant une vieille fresque où l'on voyait plusieurs gugusses enveloppés dans de grands manteaux autour d'une grande planche ... et l'un de ces gugusses était le portrait craché de Corentin la Truite. "Ce dessin-là ... il a 600 ans ... et c'est vous dessus." "Blou." "Ainsi la légende était vraie ... vous êtes cette truite que plusieurs de mes ancêtres ont connu mais dont personne ne comprenait le propos." "Blou." "Vous êtes revenu pour prendre la planche, c'est ça ?" "Blou." "Elle n'est plus ici, depuis au moins 200 ans. Quelqu'un la volée, on ne sait pas qui." "Bloubloublou, bloublou." "Alors j'ai pensé que le 'blou' tout seul voulait dire oui, mais honnêtement, dès qu'il y en a plusieurs ..." "Bloublou ..." "Je me suis pas présentée par contre, je suis Corinne, je travaille dans le bûcheronnage." "Bloublou." "Je pense que c'est pas votre vrai prénom, donc je vais éviter de vous appeler dans un dialogue ultérieur." "Bloup bloup." "... bon et bien voilà, j'aurais bien voulu vous dire que le voleur avait laissé une trace de pas ou cassé une vitre en partant, histoire d'avoir un indice, mais non, j'ai vraiment aucune idée d'où peut être la planche aujourd'hui." Corentin la Truite était déçu de l'issue de cette conversation, et décida de rentrer chez lui. Non, vraiment, il s'est plus rien passé de la journée, ensuite. Pas même de ravioli quelque part, pas de rebondissement. C'est pas toujours palpitant les histoires vous savez.
11.
Le lendemain midi (à cause d'une panne de réveil), Corentin la Truite était revenu chez Corinne le CD, mais cette fois-ci, il était vêtu d'un grand manteau. "Bigre, mais c'est le grand manteau que vous portiez sur la fresque !" s'exclama Corinne. "Bloup." répondit Corentin. Sans être plus loquace, il s'approcha de l'étagère de Corinne de laquelle le livre de la veille provenait, et prononça lentement les mots suivants : "Blou bloubloup." Mot de passe incorrect. "Bloubloup blou." Mot de passe incorrect. "BlOU BloublOUP." Mot de passe incorrect, le compte a été verrouillé. Agacé par la situation, Corentin saisit l'un des plateaux de l'étagère et parvint à trouver un bouton caché. Après avoir appuyé dessus, l'étagère se mit à émettre deux vibrations. **VVV VVV** Un micro venait d'apparaître sur le côté du meuble, Corentin s'en approcha et lui tint ses mots : "Blou bloubloup." **VVV VVV** Après deux vibrations, le micro s'était rétracté, l'étagère avait retrouvé sa position initiale. Corentin retenta sa manœuvre. "Blou bloubloup." **VVV VVV** Cette fois, c'est son manteau qui avait vibré. Un code-barres en deux dimensions était apparu, puis l'étagère avait déployé une caméra, en émettant deux vibrations à son tour. **VVV VVV** "Attendez mais elle se comporte pas comme une étagère, cette étagère." fit remarquer Corinne. Corentin approcha le code-barres de la caméra, qui se rétracta, et l'étagère vibra longuement. **VVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVVV** Le vacarme assourdissant avait été provoqué par l'étagère qui avait glissé de plusieurs mètres sur le côté, laissant apparaître un compartiment secret dans le mur, ce qui ne manqua pas d'étonner Corinne. "Ah, il y avait un truc planqué là-derrière ? C'est étonnant !" Là-derrière, il y avait un petit papier, sur lequel il était écrit "C'est ici que la planche se range normalement, je vous la confisque, signé M.R." Qui pouvait bien être ce M.R. ? "Bloublou !" Corentin avait deviné.
12.
Connaissant le chemin, Corentin n'avait sollicité l'aide de personne de l'embarcadère jusqu'au compartiment de frigo de Monsieur Ravioli. Il avait parcouru l'étendue d'eau à la nage et pris l'ascenseur de la tour de la télévision sans attendre l'issue d'un quelconque rendez-vous, ce qui ne manqua pas d'irriter celui-ci. "BLOUERGH ! Monsieur Bloupbloup ! Vous n'avez pas pris rendez-vous !" Pour toute réponse, Corentin saisit le petit papier qu'il avait récupéré à la fin du chapitre précédent. et le posa sur la table située entre eux. "BLARGH ! Vous avez trouvé cette note et deviné que M.R. voulait dire Monsieur Ravioli ! Vous êtes perspicace Monsieur Bloupbloup !" "Bloup ..." "BLEUARURGH ! Et oui, c'est bien mon ancêtre qui a récupéré la planche que vous cherchez a priori. Et vous avez de la chance, c'est la deuxième partie des règles du Cartographe de Carteries que j'ai numérisé et converti en dépliant depuis. Tenez ! Vous l'avez bien méritée." Corentin la Truite prit du paracétamol et entama la lecture. "une carte occidentale peut être posée en début de pile, ou par-dessus n'importe quelle autre carte. Si un 8 de n'importe quelle couleur est joué, la personne ayant joué la carte doit crier 'HUIT ! TOUT LE TAS EST DÉFAUSSÉ !' et ajouter toutes les cartes de la pile à sa main. Si la carte occidentale comporte un chiffre et est jouée sur une pile dont la carte de tout type au sommet comporte également un chiffre et qui soit strictement inférieur à celui de la carte occidentale jouée, la personne ayant joué la carte occidentale peut récupérer un billet factice du jeu de société de son choix qui soit de la plus faible valeur possible. Si à l'inverse le chiffre de la carte au sommet de la pile est supérieur à celui de la carte occidentale jouée par-dessus, la personne ayant joué la carte occidentale doit céder un de ses billets factice au joueur ayant joué la carte supérieure, ou déplacer son propre pion de jeu sur le côté de la pile de jeu désignée. Une carte de tarot ne peut être jouée qu'au début d'une nouvelle pile de cartes, dans la limite d'un maximum de neuf piles de cartes disposées sur la carte routière. Si une personne ne dispose que de cartes de tarot en main et qu'aucune autre pile ne peut être créée, la personne passe son tour et empoche trois billets de banque factice de son choix et de valeurs différentes. La personne jouant une carte de tarot peut lancer un vote à main levée au moment de jouer sa carte, et demander si la carte qu'il vient de jouer est jolie à son auditoire (si d'autres personnes assistent à la partie sans jouer, il leur est possible de voter également). Si la carte est jugée jolie, la personne remporte cinq serviettes en papier, sinon elle lance un dé, et si le résultat du lancer est supérieur ou égal à quatre, elle remporte trois serviettes en papier, sinon elle passe son prochain tour. Une personne ne peut lancer que trois votes de ce type au cours d'une partie. Une carte Hanafuda ne peut débuter de nouvelle pile de cartes sur la carte routière. Si une personne ne dispose que de cartes Hanafuda en main et qu'aucune autre pile n'est créée, on inverse l'ordre de jeu des différentes personnes autour de la table, et la personne ayant provoqué l'inversement donne la moitié de son jeu de cartes à la personne située à sa gauche. Si la carte jouée représente un ruban, la personne ayant joué la carte peut échanger toutes ses cartes en main avec toutes les cartes en main d'une autre personne de son choix, à condition que la personne ait bien ses cartes en main au moment où le ruban est joué, sinon elle peut refuser l'échange. Si aucune personne n'a ses cartes en main au moment où le ruban est joué, toutes les personnes autour de la carte routière doivent choisir une pile de cartes sur la table et y déposer la moitié des cartes qu'elles ont en main (arrondi à l'entier supérieur), une fois le dépôt fait, toutes les piles de cartes de la table sont mélangées entre elles, cinq cartes issues de ce mélange sont distribuées à chaque personne en suivant la logique de distribution des cartes en début de partie. S'il n'y a pas assez de cartes dans ce mélange, les cartes ultérieures seront prises dans la pile de cartes laissée face verso en début de partie. Une carte à collectionner ne peut être initialement posée sur une des piles de cartes de la carte routière. Pour être jouée, la personne disposant de cette carte doit provoquer une autre personne en duel. Si celle-ci n'a pas de carte à collectionner en main, elle passe son prochain tour. Si celle-ci a une carte à collectionner de puissance jugée supérieure par les règles de jeu internes du jeu de cartes à collectionner en question, la personne ayant provoqué le duel perd le combat et pioche une serviette en papier. Si celle-ci a une carte à collectionner de puissance jugée inférieure ou égale par les règles de jeu internes du jeu de cartes à collectionner, elle doit échanger la carte perdante avec la première carte de la pile de cartes face verso issue d'un autre set de cartes en partant de la carte située la plus proche du sol. Si la pile de cartes face verso est vide ou ne comporte que des cartes à collectionner, la personne" Arrivé à la fin du dépliant sous sa forme actuelle, Corentin la Truite décida de s'évanouir.
13.
À son réveil, Corentin la Truite avait développé une irrépréhensible envie de se gratter. "Ah vous êtes levé !" Corinne le CD était présente, c'est elle qui avait récupéré Corentin après sa perte de connaissance et l'avait emmené ... dans une usine de produits gras ? "Bloubloup ?" "Oui, vous avez fait une crise d'urticaire. Du coup je vous transporte vers la ligne qui fait les assemblages de produits dérivés de la pomme de terre. Si vous plongez dans l'huile de cuisson avec les frites et les chips, ça devrait calmer vos démangeaisons." "BLOUBLOUP ?" hurla Corentin la Truite qui avait lu bien trop d'articles de debunkage pour croire à ce type de vertus. Mais il était trop tard, il venait d'être basculé dans la cuve des patates. Il subit en premier temps la pression d'un lourd jet d'eau destiné à nettoyer les fioritures présentes sur la surface des féculents, ce qui ne lui était pas forcément désagréable en premier lieu, Corentin étant immatriculé à l'ordre des poissons. L'étape suivante était un peu plus délicate, car les pommes de terre allaient être épluchées par un set de dix-sept couteaux de cuisine par ordre d'aiguisage du plus lisse au plus râpeux, ce qui ne lui était pas non plus forcément désagréable en second lieu, Corentin n'était composé que d'une moitié de corps. L'étape ultérieure s'avéra plus complexe encore, car les pommes de terre destinées à devenir des frites allaient passer à travers une grande raquette de tennis et celles destinées à devenir des chips allaient passer par un immense coupoir de boucher ne laissant que peu d'interstices entre la scie et sa paroi, ce qui ne lui était toujours pas forcément désagréable en troisième lieu, car Corentin avait juste à se déplacer hors de la ligne de production en fait vu qu'il n'avait pas perdu ses fonctions de motricité. Mais tout était prévu, en quittant la ligne de production, Corentin chuta dans le vide, et fut réceptionné par un trampoline, mais pas n'importe quel trampoline ... un trampoline en ravioli. La réception fut si bien préparée que son contrecoup s'en retrouva très bien calibré. Ni une ni deux, Corentin fut propulsé en l'air et retomba sur la ligne de production, en compagnie des frites et des chips bien coupées à l'étape précédente. L'étape qui suivait était celle de la cuisson, les produits allaient plonger dans un immense bain d'huiles bouillantes pour leur donner le croquant nécessaire et être labellisés produits préférés des consommateurs par un panel de trois personnes, ce qui n'était décidément pas désagréable non plus pour Corentin en quatrième lieu, car le réchauffement climatique avait également réchauffé l'étendue d'eau lui servant de domicile et qu'il s'était adapté à des chaleurs insupportables. L'étape finale était celle de l'assaisonnement, tout le monde avait cuit et devait plonger dans un immense bain de cristaux de sels pour leur donner le goût nécessaire et être labellisé impropre à la consommation par plusieurs associations, ce qui échoua encore à s'avérer être désagréable pour notre truite en cinquième lieu, car vivant en temps normal dans un endroit déjà trop salé. Réceptionné par Corinne avant de tomber dans un sachet non recyclable, Corentin avait été lavé, découpé, frit et salé ... ce qui avait empiré son urticaire. "Vous voyez, ça va déjà mieux." souligna Corinne qui basait son avis sur le fait que son camarade sentait bon. Corentin quant à lui ne pouvait répondre, car il avait une nouvelle fois décidé de s'évanouir.
14.
Il avait beau disposer d'un savoir potentiellement illimité et d'un âge à faire frémir les livres des records, Corentin la Truite ne pouvait dépasser la science dans tous les domaines, et s'autorisa une période de convalescence chez lui, du temps de reposer son urticaire avec des médicaments éprouvés. Cela ne lui empêchait pas de faire le point et de décider d'une marche à suivre pour la suite. Dans un premier temps, il passa du temps sur Internet pour en savoir plus sur l'entreprise de Monsieur Ravioli, et visionna des vidéos institutionnelles présentées par son vice-sous-adjoint : un rouleau de scotch vide. "Nous vous souhaitons la bienvenue chez Ravioli SARL. Fondée voilà 300 ans, la vision de notre entreprise a toujours été celle de l'excellence. L'excellence de notre fondateur d'abord, Olivier Ravioli, qui ouvre la première échoppe de vente de ravioli aux olives, qu'il baptisa 'Les Raviolives de Raviolivier'. Nombre de ses contemporains se souvenant du goût mais surtout du nom de cette recette, Olivier eut une vision extraordinaire : celle où tous les entrepreneurs du monde bénéficieraient de son savoir-faire dans la création de noms de produits faciles à retenir pour le consommateur. Plusieurs générations se sont succédé à la tête de l'entreprise, mais ce fut enfin Charles-Conquérant Ravioli qui put réaliser la vision de son aïeul, en ouvrant la plus grande fabrique de slogans publicitaires au monde : une chaîne de télévision. Après avoir apporté son expertise auprès de plus de 100 000 clients, Ravioli SARL reste encore aujourd'hui votre partenaire de communication de choix." En coupant cette vidéo avec les informations publiées par les journaux d'investigation payants, Corentin avait néanmoins découvert que nombre de ces 100 000 clients ont déclaré des soldes budgétaires négatifs quelques semaines avant d'être rachetés par Ravioli SARL, qui a alors pu apposer son logo sur leurs produits dans un premier temps, avant de leur imposer de remplacer la plupart des produits par des ravioli, même quand ça n'avait aucun sens. Ce que cela n'expliquait pas, c'est pourquoi ces remplacements fonctionnaient, en dépit du bon sens. Pourquoi le mini-van de Corentin avait pu être réparé avec un ravioli ? Pourquoi Corentin avait-il pu rebondir sur un trampoline en ravioli dans l'usine de produits gras ? Par quel prodige un rideau composé de ravioli cuits peut rester solide ? Mais surtout, que faisait un ravioli dans un costume de plongée pour gugusse ? Puis soudainement, tout se recoupait, ceci avec l'aide d'un souvenir de Corentin ... Qu'on va aborder tout de suite parce que le suspense ça va bien cinq minutes. La Truite descendit à la cave, un lieu qui était resté non exploré pendant des années, mais qui entreposait nombre d'archives de Corentin, ou d'objets qu'il aurait préféré oublier. Parmi ces objets, il en existait un qu'il aurait préféré oublier pour de bon. Mais son souvenir lui est revenu après avoir réalisé qu'il connaissait le rouleau de scotch vide de la vidéo institutionnelle. Il était vide pour une excellente raison ... c'est Corentin qui possédait sa recharge, dans une boîte en carton restée fermée ... pendant 1600 ans. Cette boîte en carton comportait les derniers mètres d'un scotch très spécial ... un scotch pouvant adhérer à la surface des poissons. Un scotch qui a changé la vie de Corentin la Truite voilà 1600 ans.
15.
Voilà 1600 ans, Corentin était une truite tout à fait ordinaire et entière. Il travaillait dans les champs en semaine et se permettait le loisir de travailler dans les champs le week-end, avant d'aller travailler dans d'autres champs en soirée. Puis un jour de pluie, alors qu'il traversait un chemin, une carriole fit de l’aquaplaning et lui roula malencontreusement dessus, sectionnant son corps en deux. Oui, ça s'est fait comme ça, c'est très décevant pour l'instant mais attendez de connaître la suite. Le conducteur de la carriole était un rouleau de scotch à peine entamé, et avec une moustache. Il s'agissait a priori de l'ancêtre du rouleau de scotch vide que nous avons vu au chapitre précédent, car il est bien connu que nos ancêtres avaient tous une tête identique à la notre mais avec une moustache. Après avoir repris le contrôle de sa carriole, le rouleau de scotch marqua un temps d'arrêt. Il avait noté un manquement des amortisseurs de son véhicule et tenait à vérifier pourquoi avant de reprendre la route. En quittant son assise, il comprit, en voyant Corentin alors au sol, séparé en deux et inconscient. Horrifié, le scotch se précipita vers lui pour constater les dégâts. Par chance, il disposait de notions de médecine, comme à peu près tous les charlatans de l'époque. Il savait qu'il lui fallait agir vite s'il voulait sauver cette truite, car la pluie infectait les plaies et allait rendre la tâche plus ardue. N'écoutant que son courage, il saisit son ... matériel de cuisine. Après avoir préparé un petit feu couvert avec une bâche assez sommaire, il saisit une petite casserole pour y faire fondre du beurre dans de l'huile. Fouillant dans sa carriole pendant un moment, il trouva une meule de parmesan dont il trancha un morceau pour le râper en fins copeaux délicats. Une fois le gras fondu, le scotch plongea dans la casserole pour s'imbiber des arômes de cholestérol qu'il avait réalisé. Après deux minutes de cuisson, il se retira du feu et se précipita vers Corentin. Son sang ne fit qu'un tour ... puis il se déroula entièrement autour des deux parties de la truite, en espérant bien y adhérer grâce à son surplus de gras. D'accord. S'étant entièrement déroulé, le scotch plongea ensuite le corps reconstitué de Corentin dans le reste de mélange d'huile-beurre et le saupoudra de parmesan. Le temps passait, rien ne se passait. Complètement dépassé, le scotch fit involontairement l'impasse sur plusieurs étapes de cette recette du passé et obtint ainsi un résultat passable. "Bloup !" Corentin s'était réveillé ! Mais pas l'arrière de son corps. La recette n'avait que partiellement fonctionné, la pluie s'était trop diffusée dans son corps et avait rendu l'arrière inutilisable. L'entièreté du mélange de corps gras s'était donc diffusée dans la partie supérieure de son corps, et avait crée un cycle perpétuel de mélange de cuisson circulant dans le reste des muscles de la truite ! Ce cycle perpétuel avait pu maintenir la truite en vie pendant des siècles, mais non sans douleur. Traumatisé par la perte d'une partie de son corps, Corentin décida rapidement de se défaire de ce montage à base de scotch et de l'arrière de son corps qu'il rangea dans une boîte en carton qu'il n'ouvrit plus, et fit en sorte de dissimuler sa condition du mieux possible pour que jamais personne ne voie les mutilations de son corps. Réalisant plus tard qu'il était éternel, il consacra les siècles qui lui étaient donnés à l'étude du monde, en accumulant un savoir considérable sur nombre de sujets, en s'investissant à divers endroits, comme dans cette organisation qui avait rédigé la deuxième partie des règles du Cartographe de Carteries. Et 1600 ans plus tard, Corentin avait enfin retrouvé un des descendants du rouleau de scotch qui avait changé sa vie.
16.
Corentin avait pris contact avec le rouleau de scotch vide. Bien que ce dernier n'aie strictement rien compris de ce que lui disait le premier, il semblait attendre cette prise de contact, et lui donna rendez-vous dans un hippodrome le soir-même. La truite avait rejoint le lieu de rendez-vous au crépuscule. Ne sachant pas vraiment où se placer, il s'assied pile au milieu de la structure, dans l'objectif d'être visible du mieux possible, puis il patienta. La nuit était tombée, l'hippodrome était plongé dans l'obscurité la plus totale. Toujours patientant en son centre, Corentin ne pouvait strictement rien distinguer, n'ayant pas d'yeux si développés. Soudain, un des écrans de l'hippodrome s'alluma, pile au début du générique du journal télévisé, sur la chaîne appartenant à Ravioli SARL. * vut tutututu tutututu tutututu tutututu vuuduuvududuuduuduuuu vut tutututu tutututu * Cette musique de générique était décidément bien entêtante. "Madame monsieur bonsoir, et bienvenue dans VOTRE journal télévisé." Le présentateur était encore plus entêtant. "Passons sans plus tarder à cette histoire d'une famille de notre pays, ravagée par son passé. Chef cuisinier reconnu dans le monde entier, l'ensemble de sa fortune lui a été volé voilà plusieurs siècles, et ses descendants se battent depuis pour que Justice soit faite. Un reportage de Michel Scotch." L'écran s'était éteint, plongeant à nouveau l'hippodrome dans l'obscurité. "C'est l'histoire d'une famille pas comme les autres qui commence voilà 1600 ans." Corentin avait reconnu cette voix, c'était la voix du rouleau de scotch vide, qui passait à travers les mégaphones de l'hippodrome. Un des projecteurs s'alluma brusquement, braqué sur une gravure d'un rouleau de scotch à moustache. "Celle de Christian Scotch, cuisinier des plus grands notables d'Hertzenfoulchenheim, et reconnu pour l'invention des ravioli, ayant fait frémir les papilles des petits et des grands." Corentin reconnaissait le rouleau de scotch qui avait changé sa vie sur la gravure. Le projecteur s'éteignit, un autre s'alluma, braqué sur une autre gravure, représentant cette fois le rouleau de scotch moustachu en train d'être vidé de sa substance par une moitié de truite avec des dents acérées. "Pourtant, sa vie a basculé le jour où il a croisé ce qui semblait être une moitié de truite qui l'a attaqué, pour lui dérober l'ensemble du scotch dont il disposait." Corentin se demandait s'il avait vraiment développé pareille dentition à l'époque. Voilà bien longtemps qu'il ne manque jamais le rendez-vous annuel que lui donne son dentiste. Le projecteur s'éteignit, un autre s'alluma, braqué sur une autre gravure, représentant cette fois plusieurs rouleaux de scotch vides sous forme de frise chronologique. "Privé de son scotch, il fut contraint de se retirer du monde, et de condamner l'ensemble de sa famille au désespoir, à la perte de la recharge de scotch qui faisait sa fierté. Les siècles ont passé, la rancune a évolué, jusqu'à atteindre Michel Scotch, dernier membre de cette famille, qui nous a confié son ressenti." Le projecteur s'éteignit. Un temps s'écoula, sans qu'il ne se passe rien. "Le projecteur est cassé." Le premier projecteur se ralluma. Un temps s'écoula à nouveau, puis le rouleau de scotch vide était apparu essoufflé devant la première gravure, comme après avoir terminé un sprint. "... pfou ... Bonjour Michel Scotch ... pfou ... que recherchez-vous ... pfou ... aujourd'hui ?" "... pfou ... Avant tout la vengeance ... pfou ... On a volé notre ... pfou ... patrimoine sans aucune ... pfou ... forme de procès." Corentin assistait toujours à la scène entre un reporter et la personne qu'il interrogeait, où exceptionnellement les deux parties étaient la même personne. "... pfou ... Si vous rencontriez la ... pfou ... moitié de truite qui vous ... pfou ... a volé, que lui diriez- ... pfou ... vous ?" "... pfou ... et bien vous oh et puis zut ... pfou ... vous avez compris." Michel Scotch avait soudainement interrompu son auto-interview pour se diriger vers Corentin. Reprenant son souffle, il se lança dans une envolée. "C'est vous qui avez volé le scotch de mon ancêtre. C'est vous qui l'avez condamné au désespoir. C'est vous qui avez plongé notre famille dans la honte, et qui allez payer pour ça 1600 ans plus tard." Au fil de ses répliques, les trois projecteurs fonctionnels s'allumaient successivement, plongeant l'hippodrome dans une mise en scène de lumières théâtrale et dramatique. Michel Scotch se rapprochait toujours plus de Corentin, en aiguisant la partie coupante du réceptacle à scotch qui l'entourait, en gardant un air menaçant. Complètement perdu face à la situation et se demandant ce qu'il se passait, Corentin n'eut qu'une réplique : "Bloup ?" Ce qui n'allait pas l'aider.
17.
Toujours sous la menace de Michel Scotch, Corentin eut soudainement une idée, et lui tendit la boîte en carton contenant le scotch qui l'avait collé. "Qu'est-ce que c'est que ça ?" demanda Michel. "Bloup." répondit Corentin. "Ah oui c'est vrai." réalisa Michel. Le scotch ouvrit la boîte et fut interloqué en voyant toute une bande de scotch enroulée autour d'une moitié inférieure de corps de truite. "C'est ... c'est mon scotch ... mais cette odeur ... c'est l'odeur de l'huile, du beurre et du parmesan ... Les ingrédients de la recette secrète de notre dynastie, notre collant chirurgical pour scotch ... Vous n'auriez pas volé notre scotch, mais auriez été sauvé par notre ancêtre ?" Une fois de plus, nous constatons ensemble à quel point un bouche à oreille hasardeux est le meilleur moyen pour déformer une histoire, surtout sur 1600 ans. "Et bien ça m'étonnerait beaucoup ! Vous n'aviez aucun moyen de connaître cette recette mais vous l'avez obtenue et trafiqué votre larcin pour le faire passer pour un sauvetage !" Une fois de plus, nous constatons ensemble à quel point un bouche à oreille hasardeux reste un meilleur moyen d'ancrer une personne dans ses convictions face aux faits, surtout sur 1600 ans. Michel Scotch ralluma l'écran pour appuyer ses dires. Celui-ci présentait un graphique en camembert dont un quart avait été sectionné. Un gros "38%" avait été écrit sur les trois quarts restants. "Les citoyens ont été interrogés à ce propos, et comme le montre ce graphique, ils estiment en grande majorité que vous avez mis en scène ce montage avec le scotch de mon aïeul, les chiffres ne mentent pas !" Corentin était abasourdi par cette représentation grotesque et chercha à en dévoiler les failles. "Bloubloubloup ! Blou blou, bloupbloup blou ! Blou blou, bloubloublou ! Bloup bloup ?" Seulement il se souvint en cours de route de pourquoi personne ne prenait jamais son propos en compte. "Mais ce n'est pas tout, comme le montre cette courbe, de plus en plus de citoyens estiment que s'exprimer dans une langue autre que la langue officielle de notre contrée est un signe de non-intégration. Si vous voulez débattre, commencez par vous exprimer correctement !" Corentin restait subjugué devant cette courbe qui montrait effectivement une augmentation mais qui n'avait aucune unité de mesure. "Et même si vous tenez à contester les chiffres, n'oubliez pas que vous ne contesterez pas le ressenti de la majorité des citoyens !" Michel Scotch continuait de dérouler ses propos. En l'espace de cinq minutes, Corentin avait relevé douze graphiques truqués, dix-sept biais cognitifs et quatre tentatives de manipulation. Vu que tout ça ne servait à rien, il finit par quitter l'hippodrome paisiblement, en emportant avec lui son autre moitié et sa boîte mais en laissant le scotch usagé. Michel quant à lui continuait sa démonstration dans le vide et ne semblait pas avoir remarqué le départ de la truite. En rebroussant chemin, Corentin vit néanmoins un trousseau de clés au sol, qui devait forcément appartenir au scotch vu qu'il n'y avait personne d'autre dans le coin. Il l'aurait potentiellement fait tomber en courant pour le rejoindre tout à l'heure. Et en voyant de quoi était composé ce trousseau, Corentin choisit de le garder pour lui.
18.
Le trousseau de clés récupéré par Corentin comprenait une bonne dizaine de clés, chacune associée à une étiquette comprenant une suite de chiffres et de lettres incompréhensibles, comme 902b-a3cd-a188-3801-594b-6e1b-4527-90cc-5394-8fda, ou encore 08a3-5293-e09f-5084-9409-6c1c-1b38-19ed-b9df-50db, ou mieux encore 310b-86e0-b62b-8285-62fc-91c7-be53-80a9-92b2-786a. Aucune de ces séquences n'était néanmoins agréable à lire. Corentin savait déjà cependant où il avait vu de pareilles séquences. Il s'agissait de condensats des numéros d'étages de la tour de Ravioli SARL. Il venait de récupérer plusieurs clés de plusieurs pièces de plusieurs étages de la tour. Une fois de plus, il se rendit à la tour sus-nommée. Mais pas de chance cette fois, l'ascenseur était en panne. Fort heureusement, un trampoline avait été placé au rez-de-chaussée pour maintenir le flux de déplacements. Ce n'était pas du tout la solution la plus sûre, mais le comité de sécurité de l'entreprise avait été dissous, du coup c'était légal. Jonchant les corps d'employés ayant fait une mauvaise chute, Corentin était parvenu à se frayer un chemin vers le dispositif, et entama quelques bonds. Arrivé à l'étage 902b-a3cd-a188-3801-594b-6e1b-4527-90cc-5394-8fda, Corentin tomba sur un grand couloir sans aucune porte. Vu que le mystère est à la truite ce que la crème chantilly est aux fraises, Corentin raya cette expression de son carnet de bons mots et avança tout droit dans l'espoir de trouver quelque chose. Il avançait, il avançait, il avançait, toujours rien à signaler, le couloir ne semblait jamais se finir. Parfois ça bifurquait sur la gauche, c'est là toutes les variations palpitantes qu'il pouvait trouver à cette exploration. Soudain, il arriva devant l'entrée de l'ascenseur-trampoline, et comprit qu'il avait fait le tour d'un étage vide sans trouver où allait la clé dont il disposait. Agacé par la situation, il revint au rez-de-chaussée pour lire un des prospectus publicitaires faisant la promotion du bâtiment. Il s'avéra qu'en fait cet étage ne servait effectivement à rien, mais qu'une clé y ouvrant une porte avait déjà été préparée au cas où on y ajouterait une porte. Logique. Arrivé à l'étage 08a3-5293-e09f-5084-9409-6c1c-1b38-19ed-b9df-50db, Corentin vit un peu plus de portes qu'à l'étage précédent, à savoir quatre portes par mètre carré environ, mais en faisant le tour de l'étage, il se rendit compte qu'aucune d'entre elles n'avait de serrure. À nouveau agacé par la situation, il revint à nouveau au rez-de-chaussée pour lire à nouveau un des prospectus publicitaires faisant à nouveau la promotion du bâtiment. Il s'avéra à nouveau qu'en fait cet étage ne servait à nouveau effectivement à rien, mais que toutes les portes y avaient déjà été placées au cas où on y creuserait des pièces, et que la première pièce qui serait utilisée aurait une serrure correspondant à la clé déjà créée à cet effet. Logique. Arrivé à l'étage 310b-86e0-b62b-8285-62fc-91c7-be53-80a9-92b2-786a, Corentin vit à peu près autant de portes qu'à l'étage précédent, mais avec des serrures cette fois, mais toutes fermées avec ça. Corentin passa environ huit jours à tester toutes les portes de l'étage avec la clé dont il disposait, sans qu'une seule ne le couronne de succès. Toujours agacé par la situation, il se dit qu'il allait enfin garder un de ces prospectus publicitaires sur lui après son prochain tour au rez-de-chaussée parce qu'il en avait marre de faire des allers-retours et qu'il commençait à avoir mal au cœur avec tous ces rebonds. Mais s'attendant à lire une double-page sur le fait que l'étage ne servait à rien, il eut la surprise de trouver ... un fragment d'une photocopie de la troisième partie du dépliant des règles du Cartographe de Carteries ! Interloqué par la situation, il consulta les autres exemplaires du prospectus, et eut une nouvelle fois la surprise de trouver au moins un fragment de la photocopie des règles dans chaque exemplaire, glissé à la page où devrait se trouver une description d'étage. Mais pas n'importe quels étages ... tous les étages dont Corentin avait les clés ! Après avoir emprunté du scotch à l'accueil, et sans faire souffrir personne cette fois, la truite reconstitua la photocopie et entama sa lecture, non sans avoir ingéré une boîte de paracétamol entière cette fois. Pour lui c'est pas dangereux, les effets secondaires concernent que les organes de son autre moitié.
19.
"donne la carte qu'il doit échanger à son voisin de droite qui doit lui donner deux cartes de son choix issues de sa main ou de dessus de piles de cartes posées sur la carte routière. Une carte issue d'un set de type Uno peut être jouée à n'importe quel moment en-dehors de la carte routière même en-dehors du déroulement habituel de la partie. Une fois une carte de ce type jouée, la prochaine personne jouant une carte de ce type devra suivre les règles de ce jeu pour en poser une autre et appliquer les effets décrits par ces règles. L'ordre de jeu décrit par ces règles n'a pas à être forcément suivi. Si un effet d'une de ces cartes provoque une pioche de cartes, la personne devant piocher est celle précédant la personne ayant joué la carte provoquant la pioche dans le tour de jeu normal de la partie générale. La pioche doit se faire dans la pile de cartes laissée face verso en début de partie et s'ajouter à la main normale de la personne. Une carte issue d'un jeu de 7 familles ne peut être jouée que par une personne ayant sept cartes ou moins en main tous types confondus, ou par une personne ayant plus de sept cartes en main si celle-ci ne dispose que de cartes de ce type. L'âge en nombre de jours arrondi à l'entier supérieur de chaque personne autour de la carte routière est relevé. Si la personne souhaitant jouer une carte de ce type fait partie du tiers de personnes le plus jeune, il doit jouer en priorité dans l'ordre une carte d'enfant, une carte de parent, ou une carte de grand-parent. Si la personne fait partie du tiers de personnes le plus vieux, il doit jouer en priorité dans l'ordre une carte de grand-parent, une carte de parent, ou une carte d'enfant. Si la personne fait partie du tiers intermédiaire, il doit jouer en priorité une carte de parent, ou la carte de famille de son choix sinon. Une fois la carte jouée, la personne l'ayant jouée pioche une serviette en papier. Si toutes les cartes d'une même famille ont été jouées dans une ou plusieurs piles de cartes confondues et que neuf piles de cartes sont formées sur la table, on place les trois câbles USB sur la carte routière de manière à dessiner des chemins entre trois des piles de cartes ne comportant aucune carte de cette famille. Cette action ne peut être effectuée qu'une fois par partie. Une personne disposant d'une carte postale peut la jouer à n'importe quel moment de la partie en faisant abstraction du tour de jeu normal. Chaque personne autour de la carte routière n'ayant pas encore placé son pion de jeu sur la carte routière le place à l'endroit de son choix sur la carte. La personne dont le pion de jeu est placé au plus près de la destination indiquée sur la carte postale par rapport à son emplacement d'après la carte routière gagne le droit d'échanger sa place et les cartes qu'il a en main avec la personne de son choix (public de la partie inclus, auquel cas la personne à l'origine de l'échange confie toutes ses cartes hors cartes spéciales à la personne ayant pris sa place), puis peut ensuite désigner deux personnes devant faire de même (mais aucune de ces deux personnes ne peut ensuite désigner d'autres personnes devant échanger leurs places). Si la carte postale n'indique pas explicitement de destination, les échanges de places se font sur la base des emplacements physiques actuels de chaque personne et non celui de leurs pions, et seuls les pions des personnes ayant échangé leurs places doivent alors être placés sur la carte routière. Les cartes de réalité augmentée ne peuvent être jouées dans aucun contexte. Une carte de culture générale ne peut être jouée que par la personne suivant la personne devant jouer une carte d'après le tour de jeu normal, et ce avant que la personne en question ne joue sa carte. Avant de poser la carte de culture générale sur une pile, la personne la jouant doit choisir une des questions y étant inscrites et la poser à la personne dont c'est le tour de jeu normal. Si cette personne répond correctement, elle peut jouer sa carte normalement, sinon elle lance les quatre dés. Si la somme des chiffres affichés sur les dés à la suite du lancer est inférieure ou égale à 14, elle peut jouer sa carte normalement, sinon elle doit ajouter l'ensemble des cartes de la pile de cartes la plus haute en nombre de cartes à sa main. Les cartes spéciales"
20.
Corentin avait fini de lire une nouvelle partie du Cartographe de Carteries sans mettre en danger aucun de ses organes, ce qui était plutôt pas mal. Par réflexe, il s'était rendu chez Monsieur Ravioli pour faire sa lecture et avait l'intention de comprendre pourquoi ce dernier disposait en fait de toutes les parties des règles, et pourquoi il ne les lui donnait pas tout de suite s'il voulait jouer une partie. "BLOUERGH ... je vois qu'il ne vous reste qu'une partie des règles de base à trouver ..." "BLOUP ?!" "BLEUARGH ... oui, on va se contenter des règles de base pour commencer ... en pratique on peut y greffer des combinaisons spéciales de cartes pour pimenter la partie ... mais on en aura pas besoin ... nous sommes bientôt prêts." "... bloup ?" "BLARGBLARGBLARG En attendant tenez, je vous donne un indice pour trouver la dernière partie." Sur ces mots cryptiques, le gnocchetti tendit un petit flacon à la truite. Une étiquette indiquait sa composition : "Encre pour carapace, écrivez sur tous types de surfaces corporelles rigides". Et bien entendu, le flacon était en forme de ravioli. Rentré chez lui, Corentin fit passer le flacon par son armada de machines d'analyses, intelligences artificielles, grimoires et recueils de ragots ... mais rien n'en sortait ... *glorp* Ah non tiens, quelque chose vient de sortir des machines d'analyses. *glorp* Et des intelligences artificielles. *glorp* Et des grimoires. *glorp* Et des recueils de ragots. Ça avait mis le temps pour réagir, mais ça avait réagi, mal réagi plutôt ... tous ces dispositifs venaient soudainement d'être effacés et remplacés par du vide, littéralement. Plus aucune lumière n'y passait, plus aucun atome ne les traversait. Des centaines d'années de matériel venaient d'être bousillées, et aucune assurance n'accepterait de couvrir ça. Mais Corentin avait enfin compris. Il se précipita vers son mini-van et en ouvrit le capot, le moteur avait disparu et avait été remplacé par du vide, seul le ravioli de réparation était encore présent, flottant au milieu. Il consulta Internet sur une machine qu'il lui restait de libre, et vit les faits divers : une partie de l'usine de produits gras avait soudainement été remplacée par du vide, seul le trampoline en ravioli avait survécu. Il consulta également la chaîne du cuisinier-garagiste-gondolier-réceptionniste, il avait annoncé chercher un architecte avec mille ans d'expérience pour remplacer le mur de sa maison qui avait soudainement été remplacé par du vide, et dont seul le rideau en ravioli persistait. Mais ce vide avait une curieuse consistance. Privé de tous ses dispositifs, Corentin décida malgré tout de passer une tête dans le vide de son mini-van, pour récupérer le ravioli. Et alors que ce genre d'action aurait mal fini dans n'importe quelle circonstance, il s'est avéré que tartiner de la confiture sur du pain était plus dangereux que ça. La truite décomposa le ravioli et y découvrit des traces de l'encre dont il avait gagné un flacon plus tôt, ce qui lui permettait enfin de tout recouper. Tous les ravioli distribués par Ravioli SARL sous quelque forme que ce soit contenaient une encre spéciale capable de tout remplacer par du vide dans un rayon d'un mètre. L'entreprise auto-sabordait tous ses produits ... ce qui était commercialement complètement stupide.
21.
Corentin ne savait plus vraiment où donner de la tête. Il venait de découvrir l'origine d'un scandale d'obsolescence programmée à grande échelle tout de même plutôt dangereux, mais encore une fois, il ne pourrait concrètement rien faire pour lutter contre. Personne n'a jamais compris ce qu'il disait, ce qui rendait bon nombre de ses actions caduques. Et concrètement, il s'était engagé à défier le responsable de cette catastrophe dans une partie de cartes aux règles affreuses, mais à quoi servirait cette partie ? Que se passerait-il s'il perdait, ou s'il gagnait ? Vu que Monsieur Ravioli ne savait de toutes façons même pas qui il était et ce qu'il voulait, s'était-il seulement engagé à quoique ce soit ? Il restait néanmoins un point de mystère qui persistait : en quoi cette encre pour carapace, matériau central de cette affaire, avait-elle un rapport avec la dernière partie des règles du Cartographe de Carteries ? Et vu que c'était sa seule piste, Corentin décida de s'y pencher. Bah en fait il avait rien trouvé. Faute de mieux, Corentin vaqua donc a ses occupations plusieurs semaines durant, en espérant que la situation se débloque. Puis un jour, il reçut la visite de Corinne le CD. "Bonjour ! Ça baigne ?" "Bloup ..." "Ah mais oui on est dans l'eau, forcément que ça baigne. Mais bon, je vous ai enfin trouvé, je vous ai ramené quelque chose qui pourrait vous intéresser." Sur ces mots, Corinne posa un grimoire gigantesque sur l'une des tables de Corentin et l'ouvrit à la page 1871, c'est dire qu'il était gigantesque ! "Regardez, j'ai retrouvé ce vieux bouquin sous un tapis chez moi et ça reprend le même genre de fresques que celle où vous étiez la dernière fois sous des angles différents." Et là stupéfaction ! Corentin vit que l'un des gugusses avec lesquels il avait participé à la réunion de l'époque était ... un rouleau de scotch vide ! La truite avait certainement battu un record de vitesse entre sa maison et l'hippodrome. Il ne restait plus que trois chapitres et demi dont un pour lire des règles grotesques, donc il devait faire vite ! Par chance, Michel Scotch était bien là ... immobilisé au sol par le scotch de son ancêtre qu'il avait tenté de rembobiner autour de lui sans succès. Pas de chance, il était également inconscient, donc Corentin ne pourrait pas tirer grand chose de lui. Du moins c'est ce qu'il pensait, jusqu'à regarder Michel d'un point de vue qu'il n'avait encore jamais expérimenté : quelque chose était écrit sur sa base, en caractères en taille deux environ. S'il y a bien une chose que Corentin avait perdu au fil du temps, c'était son acuité visuelle, il lui fallait donc se procurer un microscope pour lire ce qui était écrit. Un autre point le dérangeait cependant : cette écriture était faite dans une encre très sombre, comme absorbant tout type de lumière ... Oui bon vous avez compris vous aussi, c'était écrit en encre pour carapace, ce qui était donc la première fois de ce récit où cette matière était utilisée pour son usage d'origine, parce que figurez-vous qu'une base de dispositif pour scotch peut être considérée comme une carapace. L'espoir renaissait, et Corentin fit un nouvel aller-retour à vitesse indécente entre son domicile et l'hippodrome pour chercher un microscope, non sans croiser Corinne le CD qui avait cherché à le rejoindre, mais en respectant les limitations de vitesse, parce que vient un moment où il fallait arrêter de faire n'importe quoi. Les lentilles vissées, Corentin pouvait zoomer sur la base de Michel Scotch et y lire ce que tout le monde attendait avec espérance : la dernière partie des règles du Cartographe de Carteries ! Et bien non, c'était la recette de ravioli aux aubergines du début de l'histoire que Michel s'était notée dans un coin, sur lui en l'occurrence.
22.
Désemparé, Corentin s'était assis au milieu de l'hippodrome, dépité, mais attendant un nouvel élément de surprise qui lui permettrait d'avancer. Cet élément, c'était Corinne le CD qui allait lui apporter, vu qu'elle était enfin arrivée à l'hippodrome. Quelle idée de respecter le code de la route ... "Hou, vous avez pas l'air dans votre assiette, sans mauvais jeu de mots vu que j'ai déjà mangé une truite meunière." "Bloup ..." "Qu'est-ce que ... oh, mais c'est la recette des ravioli aux aubergines qui est sur ce truc. Vous saviez que si on lisait cette recette à l'envers, ça racontait toute une autre histoire ?" "BLOUP ?" Et effectivement, avec l'aide de ses lentilles, de plusieurs miroirs orientés bizarrement, et d'effets de transformation, voilà ce qu'on pouvait lire : "ne peuvent être jouées sur une pile ou sur la carte routière, uniquement présentées comme jokers par les personnes étant en leur possession, et ce dans les limites d'une fois par partie et par carte spéciale. Après chaque carte jouée par une personne, cette personne peut immédiatement présenter l'une de ses cartes avant le tour de la personne suivante et appliquer son effet. La carte de transport lui permet de sélectionner un pion d'une personne de son choix et de le placer ou de le déplacer sur la carte routière à la destination de son choix, mais pas à plus de cinq kilomètres de son point d'origine à l'échelle de la carte s'il était initialement placé ailleurs sur cette carte. La carte de restauration lui permet de passer ses deux prochains tours de jeu et de s'immuniser de tout effet pouvant l'atteindre avant son prochain tour de jeu. La carte de sécurité sociale lui permet de piocher dix cartes dans la pile de cartes face verso, ainsi que dix serviettes en papier. La cordelette n'est utilisée qu'à des fins décoratives. Une personne étant en possession de cartes de jeu dans sa main n'est pas contrainte de les garder en main, ce qui lui permet de passer outre certaines règles affectant les cartes que les personnes ont en main, elles restent néanmoins considérées comme des cartes jouables. Si une personne outrepasse plus de trois effets en appliquant cette feinte, il doit replacer toutes les cartes dont il dispose dans la pile de cartes face verso, puis mélanger cette pile, et distribuer trois cartes à chaque personne autour de la carte routière dans le sens de distribution habituel. Il est possible d'acheter des cartes de la pile face verso moyennant l'utilisation des billets de banque factice. Pour définir le nombre de cartes qu'il est possible d'acheter, on calcule le plus grand diviseur commun des valeurs de chaque set de billets différent, puis on divise le résultat obtenu par la valeur affichée sur le billet. La valeur obtenue correspond au nombre de cartes qu'il est possible de piocher, dans la limite de vingt cartes. Une personne qui se débarrasse de toutes ses cartes jouables peut se munir de l'instrument de musique à sa disposition, et obtient le droit d'en jouer pendant une seconde toutes les dix secondes jusqu'à la fin de la partie. La fin de la partie est décrétée si plus aucune personne ne dispose de cartes jouables, ou si la pile de cartes face verso est vide, où si la partie a débuté voilà plus de quatre heures. Avant de procéder au calcul du score, le set de billes est intégralement renversé sur la table, et toutes les personnes autour de la carte routière doivent saisir un maximum de billes et les garder en leur possession, jusqu'à ce que toutes les billes aient été récupérées. Toute personne renversant une des piles de cartes lors de cette action ne peut plus saisir aucune bille. Si toutes les personnes renversent des piles de cartes alors qu'il reste des billes sur la carte, les billes restantes sont réparties entre les différentes personnes autour de la carte routière. Le calcul du nombre de points obtenu par chaque personne s'effectue selon l'algorithme suivant : nombre de cartes jouées hors cartes spéciales fois deux, plus nombre de serviettes en papier obtenues fois dix, plus nombre de combats remportés avec les cartes à collectionner fois cinq, plus nombre de cartes de réalité augmentée conservées fois vingt, plus fait d'avoir remporté la partie de cartes de type Uno fois cinquante, plus nombre de bonnes réponses données au questionnaire de culture générale fois quinze, plus nombre de billes en possession, plus nombre de piles de cartes sur la carte routière situées à moins de cinq kilomètres du pion de la personne à l'échelle de la carte routière fois sept, plus fait d'avoir placé le pion entre trois câbles USB fois cent. Cette somme est multipliée par la somme accumulée en billets de banque factice par la personne pour obtenir son score final. La personne ayant le plus de points remporte la partie, ainsi que la paire d'écouteurs, lui octroyant l'immunité pour une partie future : elle pourra annuler au maximum cinq effets la ciblant et" Il manquait encore un bout de règles.
23.
Ne pouvant décemment transporter Michel Scotch alors qu'il était inconscient, Corentin avait obtenu la retranscription des règles sur un bout de dépliant pour le lire chez Monsieur Ravioli comme à son habitude. Il était cette fois néanmoins excédé par ce jeu de piste qui lui était imposé et avait la ferme intention de ne pas quitter le frigo de son hôte tant qu'il n'aurait pas mis un terme à ce jeu. "BLOUERGH ... vous avez trouvé la dernière grande partie des règles, bravo Monsieur Bloupbloup !" "Bloublou, bloubloubloup !" "BLARGUEUH ... ah par contre il vous manque en effet la fin de la dernière phrase ... attendez, je vous la lis dans mon exemplaire des règles ..." "piocher une serviette en papier." "BLARG ... voilà. Vous avez des questions ?" Corentin n'avait pas osé relever le fait que le gnocchetti disposait d'un exemplaire des règles complet depuis le début. "BLEUARGHARGHARGH ... mais ne faites pas cette tête ... vous êtes la première personne à reconstituer ce puzzle depuis de trop nombreuses années ! Vous pourriez être un joueur à ma hauteur !" Pour toute réponse, Corentin jeta les débris du ravioli de son mini-van sur la table. "BLARARAR ... et vous avez aussi acheté mes produits et services et deviné ce qu'il y avait dedans ! Bravo ! Bravo !" "Bloubloubloubloup ! Bloubloublou !" "BLEURKRRRR ... mais cessez de vous égosiller ... vous n'avez toujours pas compris que je ne vous comprends pas ? Vous avez un de vos trucs qui est rempli de vide ? Et bien ... frottez dessus avec une éponge humide et ne hurlez pas." "... bloup ?" "BLEURGH ... vous voyez ... quand on domine autant de secteurs de marché avec sa propre marque, on s'ennuie beaucoup ... c'est pas simple d'être riche ... Alors quand une de mes équipes de scientifiques est parvenue à trouver la formule chimique d'une matière super-salissante alors qu'elle travaillait sur une nouvelle recette d'encre pour carapace ... j'ai saisi l'occasion de jouer une farce géante au monde." En reconstituant les dernières pièces du puzzle, Corentin était partagé entre le soulagement de voir que tout son matériel n'avait pas été bêtement détruit et le dégoût vis-à-vis de Monsieur Ravioli qui était en plein abus de position dominante. "BLOURBBBB ... c'est une encre sans consistance ... qui laisse penser qu'elle change tout en une sorte de trou noir ... mais ça part en frottant de l'eau dessus ... les gens s'en rendront vite compte et reprendront une vie normale ... et moi aussi ... vous voyez ... quand on domine autant de secteurs de marché avec sa propre marque, on s'excuse beaucoup ... et sans conséquence ... On fait des bourdes à longueur de temps ... mais c'est pas grave, parce que les gens sont dépendants de vos produits et de vos services vu que vous avez tout absorbé et rendu toute concurrence contraignante à utiliser." Corentin se demandait s'il écoutait un méchant de dessin animé ou un dirigeant de société du secteur numérique. "BLEUUURFFF ... vous vivez dans le même monde que moi, Monsieur Bloupbloup ... Vous avez vu tous ces désastres qui nous sont tombés dessus ces dernières années ... Un jour vous avez des tables basses qui tombent du ciel et qui submergent la ville ... Un jour vous avez un tueur en série qui s'en prend uniquement aux fruits ... Un jour vous avez la moitié du monde recouverte par des bâches pour boucher des failles de l'espace-temps provoquées par des groupes d'identitaires ... Nous vivons dans un monde d'absurdité." Corentin restait sans voix, ou plutôt sans bloup en l'occurrence. "BLPRTUUF ... que nous reste-t-il dans ce monde absurde, Monsieur Bloupbloup ? Vient un moment, peut-on vraiment lutter contre ces normalisations de l'impensable ? ... Personnellement j'ai choisi d'y contribuer ... J'ai épuisé toutes mes réserves de ravioli secs pour exécuter ce tour, mais je pense que ça en valait la peine ... J'aurais pu faire de la philanthropie comme tous mes confrères riches, mais cela ne m'apportait aucune satisfaction ... J'ai préféré divertir mes contemporains, en inondant le monde de tâches d'encre ... et je ne ressens pas la moindre honte ... car il ne reste à ce monde qu'une seule chose qui lui apporte réjouissance ... le divertissement." Monsieur Ravioli avait terminé sa thèse. "BLOURK ... bon ... maintenant que vous connaissez le jeu, on se fait une partie ?"
24.
Monsieur Ravioli mélangeait les cartes depuis maintenant plusieurs chapitres. Il faut dire qu'au vu du nombre de cartes devant être utilisées dans ce jeu, il valait mieux s'y prendre plusieurs jours à l'avance. Il avait également convoqué cinq gugusses supplémentaires pour jouer. Étrangement, tous étaient revêtus de grands manteaux semblables à celui que portait Corentin voilà des siècles. Du coup pour être raccord, le gnocchetti et la truite avaient également revêtu les leurs. La distribution des cartes se faisait, dans un ordre incompréhensible. Puis un gugusse a joué une carte, puis un autre, puis Corentin, puis un autre, puis de nouveau Corentin, puis Monsieur Ravioli, là y'a un gugusse qui prend des cartes au milieu de la table, là y'en a un autre qui a commencé une pile sur une table voisine, ... En fin de compte c'était pas si fascinant que ça de retransmettre une partie de cartes par écrit. Mais heureusement, le dialogue se poursuivait entre les deux principaux protagonistes de la partie. "BLEURRRRH ... ça faisait si longtemps que personne n'avait joué à ce jeu, Monsieur Bloupbloup. Je suis sûr qu'il en est de même pour vous." Corentin ne répondit pas. "BLARARAR ... mais bien sûr que je vous avais reconnu, même sans votre manteau ... Vous êtes dans les photographies d'un de mes ancêtres. Je ne sais pas comment vous avez fait pour survivre si longtemps par contre, si c'est bien vous ... Par contre je ne comprends pas pourquoi vous vous êtes amusé à rechercher les règles sachant que vous avez participé à leur écriture." Et bien c'était pour deux raisons : d'une, personne n'aurait compris ce qu'il disait s'il cherchait à affirmer ce fait, de deux, il n'avait pas non plus une mémoire illimitée, et a éliminé les savoirs les plus grotesques au fil des siècles. "BLUUUU ... quel noble jeu tout de même. Vous connaissez son histoire ? Ah mais oui suis-je bête, vous faites partie de cette histoire." "Moi je la connais pas." fit remarquer un des gugusses en guise d'unique réplique de toute l'histoire. "BRRRRLBRBRL ... il fut un temps ... où Hertzenfoulchenheim était régi par des nobles autoritaires ... un peu comme aujourd'hui vous me direz mais c'était pas les mêmes ... Ces nobles étaient spécialisés dans la réécriture de la géographie, et affirmaient contre tout bon sens que certains lieux se situaient à un endroit complètement différent de ce qui était admis par tout le monde ... et ils finissaient par convaincre de plus en plus de personnes ... Bon nombre de personnes finissaient ainsi mal aiguillées et leur quotidien devenait un enfer. Soudainement ... les faits situant une boulangerie dans la rue de gauche n'étaient soudainement plus audibles face aux discours prétendant à tort qu'elle se situait dans la rue de droite, et les gérants de la boulangerie perdaient ainsi des clients ... C'est devant cette situation que tous les cartographes de la région ont commencé à se réunir, et ont ouvert diverses échoppes clandestines un peu partout ... Ils y vendaient des cartes à jouer, mais cachaient une carte géographique strictement correcte dans chaque paquet, afin de lutter contre la désinformation ... Mais leur action devait être strictement confidentielle, et ils ont ainsi dû mettre au point un code secret pour se reconnaître entre eux ... Ce code, c'étaient les règles du jeu du Cartographe de Carteries ... toute personne qui pourrait en mener une partie jusqu'au bout serait reconnue comme un des cartographes ... Seulement, cet ordre s'est perdu au fil des âges ... ces règles étaient bien trop compliquées à retenir, et du temps de finir une partie pour s'identifier, ils avaient été reconnus et dénoncés au pouvoir ... Que cette histoire nous soit parvenue est un miracle en soi." En évoquant cette histoire, les souvenirs de Corentin lui revenaient peu à peu ... et l'un d'entre eux le fit tiquer. À l'époque cartographe, il se souvenait du fait que la plupart des parties se jouaient à huit, et qu'aujourd'hui ils étaient sept autour de la table. Si l'idée était de reproduire l'ambiance de l'époque avec les manteaux et tout, c'était raté. Il cogitait toujours alors que la partie touchait à sa fin, le calcul des scores se faisait sans calculatrice, conformément à l'ambiance de l'époque, ce qui allait prendre des jours. Plusieurs jours plus tard, le comptage du score donnait Corentin gagnant. "BLOURGHOUGHOU ... et bien je me suis bien amusé. Merci à vous et bravo pour votre victoire. Pour la peine, vu que ça semblait vous contrarier, je vais interrompre ma plaisanterie avec les ravioli ... Ce sera mon gage de défaite." Tout est bien qui finit bien, l'affaire des ravioli était résolue et l'histoire touchait enfin à sa fin. Mais à cet instant, Corentin se souvint d'un de ses confrères cartographes, un de ses confrères qui ne lui avait jamais adressé la parole, et qui le regardait toujours de travers sans que la truite ne comprenne pourquoi. Ce confrère ... était un rouleau de scotch vide. "BLOUBLOUBLOUP ! BLOUBLOUBLOU ! BLOUBLOUBLOU ! BLOU ! BLOU !" "BLEURGH ... quoi, vous voulez pas que je coupe ma blague ? C'est pour ça que vous hurlez ? ... Ou c'est parce qu'on a joué à un nombre de joueurs impair à ce jeu ? ... Mais c'est pas grave, les jeux ça évolue vous savez ! C'est le joueur qui devait être à cette place qui me l'a appris, avec les règles et l'histoire de ce jeu ! ... C'est mon adjoint, Michel Scotch ... Il devait préparer le clou final de notre blague en versant un seau d'encre pour carapaces géant sur la ville, ... ceci pendant que je vous occupais avec mon divertissement ... mais j'ai plus de nouvelles de lui, et de toutes façons je dois annuler la blague." Corentin était initialement à moitié rassuré, mais il repartit finalement chez lui serein. Il avait jugé que Monsieur Ravioli n'avait finalement pas nécessairement de mauvais fond, car en choisissant de mettre un terme à sa mauvaise blague, ... il était cohérent dans sa vision absurde du monde. Du côté de l'hippodrome, Michel Scotch était toujours étendu au sol, et avait fini par décéder emmitouflé dans le scotch de son ancêtre. Une forme indescriptible saisit son corps et l'emporta hors de la structure.
25.
Conclusion 01:04
Merci aux gugusses ayant vu leurs mots sélectionnés pour les titres des chapitres de ce récit, à savoir : Drumaturgie : assourdissant, majorité, parti. Lefra : scotch, bredouille. MegTek : raviolis, coma, bûcheron, pomme de terre. Meta Fight : plongeur, mini-van, gondole, dépliant, urticaire, hippodrome, carapace. Tom4S : condensats. ZerOcarina : motif, garagiste, télévision, frigo, tour, lecture, planche, étagère, poisson, cuisine, lumière, chiffres, trampoline, encre, scandale, tâche, honteux, cartes. Merci également aux gugusses ayant proposé d’autres mots non retenus pour ce récit ! Merci également aux gugusses ayant lu ou écouté le récit tout au long de sa publication, ou après ! Merci également aux gugusses ayant pris connaissance de l’existence de ce récit ! Merci également aux gugusses qui ont acheté la version papier de ce récit (plus d'informations sur comment l'avoir sur georgeslasaucisse.fr) ! Merci également aux gugusses relatifs à ce récit ou un peu moins que j’aurais oublié !

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Un grand Conte de Noël collaboratif publié en Novembre 2020 !

Également écoutable sur Funkwhale : funkwhale.desmu.fr/library/albums/5/

Conte en version papier sur Lulu : www.lulu.com/fr/shop/desmu-/corentin-la-truite-joue-une-partie-de-cartes/paperback/product-vw95k9.html

Conte en version audiobook sur Lulu : www.lulu.com/fr/shop/desmu-/corentin-la-truite-joue-une-partie-de-cartes/ebook/product-egkn8p.html

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released November 24, 2020

Mots proposés par :
- Drumaturgie
- Lefra
- MegTek
- Meta Fight
- Tom4S
- ZerOcarina

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Desmu Alsace-Champagne-Ardenne-Lorrain, France

On rigole bien ici. Je crois.

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